Euro Détachement

 
Détachement des travailleurs :
Le point de vue des ACTEURS

Le point de vue des employeurs de la construction

Sensibiliser-Informer-Accompagner

 

L'information est un des éléments centraux pour le respect des dispositions législatives en général et en particulier pour celles concernant le détachement, dans lesquelles la dimension transnationale apporte une difficulté supplémentaire.
Il est donc important que les différents acteurs, entrepreneurs, salariés, organismes chargés du contrôle, puissent avoir accès à cette information qui doit être facilement trouvable, précise, compréhensible et fiable.
Les entrepreneurs doivent pouvoir connaître, avant le détachement, toutes les démarches administratives à effectuer et toutes les dispositions législatives à respecter dans le pays d'accueil. Le cas échéant, ils doivent pouvoir vérifier les informations concernant un entrepreneur d'un autre Etat membre avec lequel ils souhaitent éventuellement collaborer.
Les salariés doivent pouvoir connaître leurs droits concernant les conditions de travail dans le pays où ils seront détachés.
Les organismes chargés des contrôles doivent savoir, avant le début de tout détachement, quelle entreprise viendra sur leur territoire, pour quelle durée, à quel endroit, avec quels travailleurs, etc… Ils doivent également pouvoir disposer d'un accès aisé aux informations relatives à une entreprise et à ses salariés dans leur pays d'origine.
C'est pour cela que les employeurs de la construction :
  • sont favorables à un soutien aux initiatives des partenaires sociaux concernant l'accès à l'information (par ex. le site FIEC-FETBB)
     
  • encouragent les Etats membres à mettre sur pied des systèmes de notification préalable au détachement
     
  • encouragent les autorités publiques à collaborer activement dans le développement des outils existants pour les échanges d'informations (par ex. les systèmes IMI, le système d'information du marché intérieur, ou EESSI, le système d'échange d'informations pour les organismes de sécurité sociale) ou d'accords bilatéraux, avec la possibilité aussi pour les prestataires de services d'utiliser ces canaux d'information pour vérifier certaines données relatives à un partenaire potentiel d'un autre Etat membre. Le développement de ces outils est à poursuivre et à compléter par une automatisation de la transmission de certaines informations. A terme, l'interconnexion des registres de commerces nationaux serait aussi de grande utilité, aussi bien pour les prestataires de services que pour les autorités de contrôle. Le tout dans le respect des règles de protection des données à caractère personnel
     
  • sont favorables à l'idée d'un "guichet unique" pour l'accès à l'information tel que proposé dans la proposition de Directive relative à l'"exécution de la Directive Détachement" et, au-delà des initiatives des partenaires sociaux, soulignent la responsabilité principale des pouvoirs publics pour la mise à disposition de ces informations

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Le rôle des partenaires sociaux

 

Les représentants des employeurs ont un rôle important à jouer, vis-à-vis du législateur, vis-à-vis de leurs membres respectifs et vis-à-vis des représentants des salariés.
Vis-à-vis du législateur, il est primordial de développer un dialogue le plus en amont possible afin de s'assurer que les mesures qui seront prises soient adaptées aux objectifs à atteindre, ainsi qu'aux spécificités qui peuvent être propres à chaque secteur, et qu'elles soient effectivement applicables par ceux qui devront ensuite les respecter.
C'est notamment pour cela qu'au niveau européen l'Art. 154 du Traité de l'UE prévoit une obligation de consultation des partenaires sociaux de la part de la Commission européenne dans toute une série de domaines.
Au niveau national également, le dialogue social joue un rôle essentiel car il permet aux partenaires sociaux de développer et de mettre en place des instruments dosés et adaptés aux spécificités de chaque pays.

Ensemble, les partenaires sociaux peuvent également développer des initiatives et des outils conjoints, qui seront par la suite plus facilement pris en compte par leurs membres respectifs.

Dans la perspective du détachement et de la lutte contre le travail non-déclaré, au niveau national, cette collaboration a donné naissance dans plusieurs pays à différentes mesures dont par exemple des cartes de contrôle de l'accès aux chantiers ou, au niveau européen, au site développé par les partenaires sociaux de la construction, la FIEC et la FETBB.
Enfin, la collaboration entre partenaires sociaux prend aussi la forme, dans la plupart des Etats membres d'Europe Occidentale, de "fonds paritaires sociaux" (ils restent malheureusement quasi inexistants dans les pays d'Europe Centrale et Orientale, à l'exception de la Roumanie). Au travers de ces organismes, il est également possible de développer des outils permettant d'encadrer les entreprises de construction sur le marché national et, au travers d'accords bilatéraux avec des organismes similaires dans d'autres Etats membres, également dans les opérations transfrontalières. Les employeurs de la construction soutiennent le développement de tels fonds dans les pays où ils n'existent pas encore (principalement dans les pays d'Europe Centrale et Orientale).

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Le point de vue d'EFFAT

 

Le projet réalisé avec l'INTEFP s'inscrit dans les travaux de longue date du secteur agriculture de l'EFFAT sur la mobilité mais aussi sur le travail illégal. Le cadre tripartite a permis une perspective élargie à d'autres acteurs, ainsi qu'approfondie sur le détachement. Les débats ont été riches. Ils ont permis de dégager des visions communes entre pays d'envoi et d'accueil des salariés migrants.
L'agriculture est le secteur qui emploi le plus de migrants en Europe, environ la moitié des 4 millions de saisonniers. L'agriculture est aussi un secteur connu pour un fort taux de travail non déclaré.

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La pertinence du détachement dans l'emploi agricole en Europe

 

Cette question nous a préoccupés tout le long de l'étude.

En effet les différentes formes de détachement ne sont pas pertinentes en agriculture:
  • La prestation de service n'existe pas pour le travail saisonnier. En France, les vérifications par les inspections du travail de ce type de sociétés ont démontré qu'il s'agissait dans les faits de situations de marchandage et prêt de main d'œuvre illicite
  • Le détachement par l'intermédiaire de sociétés de travail temporaire est apparu ces dernières années en France et connaît une forte progression

Les échanges ont permis de constater que les autres pays partenaires ne connaissent pas cette forme d'emploi en agriculture. Par ailleurs, les exploitations agricoles en France n'ont jamais fait appel à des sociétés de travail temporaire installées en France plus chères qu'une embauche directe.
Cette forme d'emploi est apparue avec des sociétés étrangères, spécialisées dans le placement transnational. Beaucoup laissent penser qu'il s'agit dans les faits d'un montage spécifique pour échapper aux contrôles et mieux cacher certains abus : travail non déclaré ou sous-déclaré, paiement au forfait en dessous du salaire minimum et des minima fixés par les conventions collectives.
Nous avons fait le constat que les organisations syndicales et les services de contrôle ont beaucoup de difficultés à appréhender la situation des salariés. Dans la majorité des cas d'origine extracommunautaire, ils sont vulnérables, isolés et ne maîtrisent pas la langue française.
Sous ces conditions, il est impossible pour les organisations syndicales d'établir un contact avec eux.

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Le contrôle et la coordination transnationale

 

Les échanges ont permis de faire le constat que le travail de coordination des services n'est pas performant, même si des progrès ont été faits et sont encore en cours. Cela tient au fait que certains pays ne répondent pas aux sollicitations de leurs homologues ou de façon incomplète.
Est-ce un hasard si ce sont les mêmes pays qui habituellement offrent le cadre de l'optimisation sociale ou fiscale ?
Nous avons constaté également que les moyens des organisations syndicales et du contrôle sont insuffisants pour répondre à ce type de situations complexes. Ceci d'autant plus dans un contexte de contraintes budgétaires.
En conclusion : dans toute l'Europe, l'emploi agricole est une affaire de relation directe entre employeurs et salariés. S'il y a détachement, cela tient à la facilité de contourner la législation.

La meilleure coordination entre partenaires sociaux et services de contrôle ne peut compenser une législation nationale et européenne défaillante sur le détachement et le travail non déclaré.

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Le rôle des partenaires sociaux et des pouvoirs publics

 

L'Union Européenne à 27 permet la liberté de circuler et de travailler dans un espace ou les écarts de revenu sont importants.
Les partenaires sociaux et les pouvoirs publics ont un rôle de premier ordre à jouer dans la construction d'un espace économique performant avec une régulation sociale coordonnée et harmonisée, pour une compétition excluant le dumping social.
Depuis 50 ans maintenant nous avons un dialogue social européen en agriculture, soutenu par la Commission européenne.
Dans ce cadre, nous fournissons un appui aux partenaires sociaux des nouveaux pays adhérents pour développer leur dialogue social national sectoriel. Un dialogue social constructif assure la régulation sociale, atténue les conséquences négatives des mutations, favorise le développement économique.
Dans ce cadre, nous développons également des instruments de mobilité et de sécurisation du parcours des salariés migrants :
  • une plateforme transnationale de placement informatisée est en cours d'élaboration. Elle doit permettre de créer le contact entre un employeur et un candidat à un poste, de pays différents, sur la base des compétences et aptitudes. Ce service devrait être intégré dans EURES, la plateforme de coordination des services publics européens de placement
  • un Agripass pour les saisonniers doit permettre de sécuriser leur parcours en traçant leur expérience professionnelle. Il pourrait être complété par un suivi de leur situation au regard de leurs droits à protection sociale et retraite

     
Deux plateformes Internet d'information sur les droits des saisonniers migrants ont été créées par l'EFFAT : Agripass et Agri info.
La mutualisation de moyens dans un cadre paritaire ou tripartite permettra surement d'améliorer ces plateformes.
Enfin, un autre défi pour les différents acteurs, services publics, organisations patronales et organisations syndicales est de construire un cadre d'action européen et transnational.
L'exemple de la FGA et de Podkrepa est un exemple, les relations entre services de contrôle dans le cadre de ce projet en sont un autre.

En conclusion :

Nous ne pouvons pas laisser le placement transnational des salariés aux mains de sociétés de placement basées sur l'optimisation sociale et fiscale. Le cadre juridique du détachement leur offre aujourd'hui des facilités pour profiter des écarts entre pays et d'échapper au contrôle.

EFFAT estime que la création d'un marché du travail européen et la sécurisation du parcours des migrants est l'affaire des pouvoirs publics et des partenaires sociaux, le dialogue social en est le cadre adéquat.
La pérennité de notre modèle social européen tient à la réussite de cette mission.

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